Dans une espèce récente, la Cour de cassation a rappelé que dans la mesure où un exproprié doit être indemnisé de son préjudice direct, matériel et certain (article L. 321-1 du code de l’expropriation), toute expropriation partielle, quelle que soit la nature du bien exproprié, est susceptible de justifier le cas échéant l’octroi d’une indemnité accessoire au titre de la dépréciation du surplus.
En effet, en cas d’expropriation partielle, à savoir d’une partie seulement de la propriété de l’exproprié, ce dernier est théoriquement fondé – lorsque cette demande est justifiée par la démonstration d’un préjudice répondant aux critères susvisés – à solliciter une indemnité pour dépréciation du surplus. Une telle indemnité est destinée à réparer le préjudice lié à la perte de valeur des surfaces résiduelles qui demeureront la propriété de l’exproprié.
Il s’agit là d’un cas fréquent lorsque des immeubles bâtis se voient amputés de tout ou partie de leurs espaces extérieurs (jardin, cour…).
Dans cette espèce, la Cour d’appel avait toutefois refusé une telle indemnité au motif que les biens expropriés étaient pour leur totalité des terrains à bâtir. Les juges avaient donc considéré que l’indemnisation de la valeur des mètres carrés expropriés à leur juste prix suffisait à réparer le préjudice subi par l’exproprié, puisque ce dernier conserverait des surfaces de terrains à bâtir dont la valeur était appréciée sur les mêmes bases que celles des surfaces expropriées.
La Cour de cassation a censuré cet arrêt, rappelant en conséquence que la valeur d’un terrain à bâtir, au-delà de la simple multiplication arithmétique de sa valeur au mètre carré par sa surface, doit également s’apprécier au regard de sa consistance globale.
En d’autres termes, l’expropriation partielle d’un terrain à bâtir peut être de nature à obérer les capacités constructibles des surfaces résiduelles (d’un point de vue tant réglementaire qu’opérationnel) de sorte qu’une indemnité pour dépréciation du surplus pourra être octroyée pour compenser le préjudice résultant de la diminution de valeur desdites surfaces.
En matière d’expropriation, l’indemnité principale n’est pas tout et la vigilance, aidée par des conseils juridiques avisés, permettra d’éviter d’oublier certains postes d’indemnisation accessoires pourtant légitimes.
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