Les "vautours du Cognac" ou les failles de la législation en matière d'autorisation de replantation

Le Tribunal administratif de Poitiers, dans un jugement en date du 13 juin dernier, vient de trancher le contentieux des « vautours de cognac » dont la filière s’est largement émue ces derniers mois.

Nous rappellerons que cette affaire concernait le cas de huit viticulteurs de la région de Cognac qui, grâce au mécanisme des autorisations de replantation, avaient acheté en Loire-Atlantique des pieds de vignes à bas prix, les avaient arrachés, et avaient sollicité auprès de FranceAgrimer l’autorisation de replanter cette même surface de vignes arrachées dans le vignoble de Cognac, là où les pieds de vignes présentent une valeur indéniablement plus élevée.

Grâce à une faille juridique qui existait en amont des récentes réformes en la matière, et sauf cas particuliers, rien n’interdisait en effet de solliciter les autorisations de replantation dans un vignoble distant de plusieurs centaines de kilomètres.

Dans le présent cas d’espèce, FranceAgrimer avait toutefois refusé cette autorisation aux huit agriculteurs précités par une décision en date du 5 mai 2017.

Ces derniers ont contesté ce refus devant le Tribunal administratif de Poitiers.

Le Tribunal, qui était tenu d’apprécier la légalité de cette décision de refus à la date à laquelle elle avait été prise, c’est-à-dire au 5 mai 2017, a strictement appliqué la législation en vigueur à cette date.

Il était donc tenu de constater qu’une autorisation de replantation est automatiquement acquise lorsque les conditions sont réunies, ce qui était le cas en l’espèce. Il a également constaté que la législation alors applicable n’interdisait pas que cette replantation ait lieu dans un vignoble distinct et éloigné de celui des pieds de vignes arrachés. Et enfin, le Tribunal a constaté qu’au regard des objectifs poursuivis par la législation, aucune fraude ne pouvait être caractérisée puisque ladite législation n’était pas destinée à protéger les productions locales mais à permettre le développement progressif de l’offre de vigne.

Alors que, selon le Tribunal, l’application stricte de la règle de droit ne permettait manifestement pas de justifier la décision attaquée, FranceAgrimer et le Bureau National Interprofessionnel de Cognac (BNIC) n’auront de toute évidence pas réussi à convaincre la juridiction du « détournement de l’esprit de la réglementation» qu’ils invoquaient.

Il sera toutefois précisé que la position du Tribunal aura probablement été confortée par les modifications récentes de la législation en la matière qui désormais interdit le transfert des autorisations de replantation dans des bassins viticoles distincts, cette modification de la législation étant un aveu implicite de la difficulté liée à la faille juridique qui existait jusque là à ce titre.

Nous ne manquerons toutefois pas de suivre les suites de ce contentieux dans l’hypothèse où il serait porté devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux.

http://poitiers.tribunal-administratif.fr/content/download/136895/1386168/version/1/file/TA86%20-%201701531.pdf

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